05 juin 2017

Cancún– L’Association du transport aérien international (IATA) indique que le rendement de l’industrie aérienne mondiale en matière de sécurité, de durabilité et de rentabilité est solide, mais que l’industrie est menacée par la possibilité de mesures gouvernementales protectionnistes. L’IATA demande aussi aux gouvernements d’accentuer leur collaboration avec l’industrie pour relever les défis croissants sur le plan de la sûreté, éviter une crise imminente dans les infrastructures et mettre au point une réglementation plus intelligente.

Le Rapport du directeur général sur l’industrie mondiale du transport aérien a été livré à la 73e Assemblée générale annuelle et au Sommet mondial du transport aérien. L’événement s’est ouvert aujourd’hui à Cancún, au Mexique, et il réunit 1 000 dirigeants et intervenants de l’industrie. Voici les points saillants du discours d’Alexandre de Juniac :

Résultats financiers de l’industrie – Bien que les différences régionales demeurent importantes, l’industrie aérienne dans son ensemble génère des bénéfices supérieurs au coût du capital. En 2017, l’industrie aérienne mondiale prévoit générer des bénéfices de 31,4 milliards $ pour des recettes de 743 milliards $. Cela correspond à un bénéfice moyen de 7,69 $ par passager.

Défense contre les mesures protectionnistes – « Rien ne doit entraver l’industrie de la liberté qu’est l’aviation. L’aviation représente la mondialisation dans ce qu’elle a de meilleur. Mais pour obtenir les nombreux avantages de l’aviation, nous devons ouvrir les frontières aux personnes et au commerce. Aujourd’hui, nous affrontons des obstacles posés par ceux qui nient les avantages de la mondialisation et veulent nous orienter vers le protectionnisme. C’est la menace qui pèse sur notre industrie. Nous devons témoigner des réalisations de notre monde connecté. Et nous devons garantir les avantages de l’aviation pour les générations futures », a déclaré Alexandre de Juniac, directeur général et chef de la direction de l’IATA.

Sécurité – L’avion demeure, et de loin, le mode de transport longue distance le plus sûr. En 2016, l’industrie a effectué 40,4 millions de secteurs de vol et il y a eu dix accidents fatals. L’Afrique subsaharienne a connu un succès majeur en 2016 en matière de sûreté. Cette région n’a subi aucune perte de coque d’avion à réaction l’an dernier.

L’IATA s’est dite préoccupée par les États qui ne respectent pas leur obligation d’enquêter en profondeur sur les accidents. « Les accidents sont rares, mais chacun d’eux est une occasion d’en apprendre plus sur la façon de rendre l’aviation encore plus sûre. C’est pourquoi les enquêtes sont obligatoires en vertu de l’Annexe 13 de la Convention de Chicago. Mais sur les 1 000 accidents survenus au cours de la dernière décennie, on ne peut consulter que 300 rapports, et nombre d’entre eux sont incomplets. Il n’y a pas d’excuse pour une telle statistique. Les gouvernements doivent faire mieux », selon M. de Juniac.

Durabilité – L’année 2016 a été marquée par une réalisation importante, à savoir le Régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (CORSIA) adopté à la 39e Assemblée de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI). À ce jour, 70 États représentant au moins 80 % de la croissance future prévue ont indiqué qu’ils participeraient volontairement au régime. Cela constituera un levier clé pour l’atteinte de l’objectif de l’industrie, qui s’est engagée à atteindre une croissance neutre en carbone à compter de 2020 et à réduire de moitié ses émissions nettes d’ici 2050 (par rapport au niveau de 2005).

Le succès du CORSIA n’est pas compromis par la décision des États-Unis de se retirer de l’Accord de Paris. « La décision décevante des États-Unis de tourner le dos à l’Accord de Paris n’est pas un recul pour le CORSIA. Ce sont deux mesures entièrement distinctes. L’option de rechange au CORSIA est un ensemble disparate de mesures inefficaces, coûteuses et ingérables. Nos membres demeurent unis dans leur adhésion au CORSIA et à nos objectifs concernant les changements climatiques », ajoute M. de Juniac.

L’AGA a adopté une résolution qui demande aux gouvernements de parachever les détails du CORSIA en donnant aux compagnies aériennes suffisamment de temps pour le mettre en œuvre; de soutenir la commercialisation de combustibles d’aviation durables; et de moderniser la gestion du trafic aérien.

Collaboration pour régler les problèmes de sûreté : L’IATA a prévenu que bien que l’aviation affronte des menaces en matière de sûreté, il faut trouver des solutions autres que l’interdiction des appareils électroniques personnels en cabine mise en vigueur par les États-Unis et le Royaume-Uni sur certains vols en provenance du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.

« Nous devons croire que des renseignements fiables sont à l’origine de la décision des ÉtatsUnis et du Royaume-Uni d’interdire les appareils électroniques personnels sur les vols en provenance de certains aéroports d’Afrique et du Moyen-Orient. Mais la mesure elle-même met à l’épreuve la confiance de l’industrie et du public. Nous devons assurer la sûreté. Les gouvernements ont manifestement le devoir de faire en sorte que les mesures soient logiques, efficaces et efficientes. Mais ce n’est pas le cas de l’actuelle interdiction des appareils électroniques personnels. Il faut que cette mesure soit remplacée », soutient M. de Juniac.

L’IATA a demandé aux gouvernements d’adopter des mesures de rechange à l’actuelle interdiction. « À court terme, cela pourrait être des fouilles plus approfondies à l’embarquement et de la formation professionnelle. À moyen terme, des technologies de détection des explosifs plus rapides et plus avancées constitueront la solution à la menace évolutive de bombe. Mais les processus de certification lents et pénibles doivent être accélérés pour que nous puissions utiliser ces technologies », selon M. de Juniac.

M. de Juniac a insisté sur l’importance de travailler avec les gouvernements pour régler les problèmes de sûreté. « La sûreté est ultimement une responsabilité gouvernementale. Mais les compagnies aériennes doivent jouer un rôle important dans ce domaine. La sécurité et la sûreté de nos passagers et de nos équipages sont en tête de nos priorités. Nous possédons une expérience opérationnelle cruciale qui peut aider les gouvernements et il est difficile de comprendre leur résistance à une plus grande collaboration. Nous trouverions de meilleures solutions en travaillant ensemble. »

L’AGA a adopté une résolution qui demande aux gouvernements de collaborer plus étroitement entre eux et avec l’industrie pour assurer la sûreté de l’aviation. L’Assemblée a aussi approuvé fortement les efforts de l’OACI en vue de mettre au point le Plan pour la sûreté de l’aviation dans le monde (GASeP) qui posera les bases d’une collaboration plus efficace en matière de sûreté.

Infrastructure : « Une crise des infrastructures est imminente. Dans plusieurs parties du monde, les infrastructures suffisent à peine à la demande actuelle. Et les plans de développement ne sont pas assez ambitieux pour satisfaire les besoins des 7,2 milliards de passagers que nous aurons dans 20 ans », selon M. de Juniac. Les goulots d’étranglement et des lacunes dans les aéroports et les services de circulation aérienne sont visibles dans tous les coins de la Terre.

L’IATA a demandé aux gouvernements de mettre en œuvre intégralement les Lignes directrices mondiales de l’IATA sur l’attribution des créneaux et de gérer efficacement les capacités limitées des aéroports. Elle a aussi prévenu que les lignes directrices ne sont pas une solution de rechange à l’expansion de la capacité là où la demande existe. « Les gouvernements ont la responsabilité de fournir une capacité suffisante, des services de qualité adaptés aux attentes des utilisateurs et à coût raisonnable. Capacité, qualité et accessibilité. Il va de soi que nous devons insister sur cela dans notre dialogue avec les gouvernements », ajoute M. de Juniac.

L’IATA a aussi prié instamment les gouvernements de faire preuve de prudence lorsqu’ils privatisent les infrastructures d’aviation. « La privatisation n’a pas rempli ses promesses dans de nombreux pays, dont l’Inde, le Brésil, la France et l’Australie, pour n’en nommer que quelques-uns. Le concessionnaire fait de l’argent. Le gouvernement fait ses coupures. Les compagnies aériennes paient la facture, et généralement elle est salée. Et les passagers et l’économie régionale subissent les conséquences de ces coûts plus élevés. Quand les gouvernements privatisent des infrastructures vitales, il faut absolument une réglementation économique. À ce jour, je ne peux citer un seul dossier à succès. La recherche d’une solution est une tâche important qui nécessite la collaboration des gouvernements et de l’industrie. C’est le seul moyen de créer un équilibre entre le besoin de profits des investisseurs et le besoin de la communauté de jouir d’une connectivité rentable. »

Réglementation intelligente : La mise en place d’une réglementation intelligente est difficile dans une époque qui recherche des résultats immédiats.

La majorité des 100 000 vols effectués chaque jour se déroulent sans incident. Toutefois, quand les choses vont mal, le pouvoir des médias sociaux de blâmer instantanément les compagnies et l’industrie tout entière est formidable.

« Les autorités réglementaires et les politiciens peuvent être assurés que la discipline imposée par les forces de la concurrence a reçu une forte impulsion. Et les autorités réglementaires elles-mêmes subissent la pression des adeptes des médias sociaux qui réclament des solutions immédiates. C’est pourquoi les principes de réglementation intelligente sont absolument essentiels », selon M. de Juniac.

 

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